« sombre. il fait sombre, très, dans mes alentours alentours potentiels puisqu’en réalité je n’y vois rien. Ne fais que deviner. Ce qu’il y a. dans les dits alentours. » Sa diction s’en trouve saccadée. Mais sa réflexion reste posée. Le pré-mortem que Roger Lahu met ici en scène ne s’affole pas. Le réconfort lui vient de ce passé qui semble vouloir revivre, par séquences brèves, sur cet écran très noir qui ne diffuse ses images qu’en intérieur absolu. « c’est long mais on s’habitue finalement. ce noir tout ce noir ça fait écran. » Partant de cette situation, pour le moins inconfortable, d’un mort qui se demande s’il l’est vraiment, et qui parvient peu à peu à détecter des indices qui se contredisent les uns les autres, Roger Lahu concocte un subtil traité du noir. Il tourne autour de la couleur fondamentale. Coincé dans ce sas qui lui fait penser à une « salle d’art et décès », le narrateur ne peut s’empêcher de tuer le temps en pensant aux bienfaits de cet entre-deux qui a des allures de clap de fin. « parfois il semble que le noir pourrait s’écailler, se fendiller, s’ouvrir, bailler, comme une huître et dedans il y aurait une énorme perle une perle d’un noir si profond si parfait si absolu qu’on aurait l’impression qu’elle avait – au terme de quelle alchimie de mille ans ? – concentré en elle toute la lumière du monde. ça éblouirait » Ce serait donc peut-être cela la fameuse petite lumière dont parlent ceux qui reviennent d’une agonie ratée ? Lui, en tout cas, ne voit rien venir. Ce qui lui permet de poursuivre sa longue aventure dans l’outre-noir en se repassant un titre de Johnny h ou en écoutant Patti Smith chanter Because the night avec en arrière-plan un type en motocyclette qui disparaît à toute allure sur un invisible ruban de bitume. « on dirait que le héros tout de cuir vêtu botté de noir aussi (marlon negro ?) il chevaucherait une moto noire de grosse cylindrée et il filerait filerait filerait sur une route toute noire » © Jacques Josse in Remue.net Petit traité du noir sans motocyclette (sauf une in extremis) // Roger LahuLa section commentaire est fermée.
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